Au cœur de l’Ubangi, dans le nord de la province de l’Équateur en République Démocratique du Congo (RDC), se trouve le peuple Ngbaka, une communauté homogène riche d’une histoire fascinante, avec une présence également en République Centrafricaine (RCA). Il y a à peine deux siècles, ils habitaient encore la RCA, notamment dans les bassins du Tomi, Kemo et Ombela. Selon la tradition orale, ils ont émigré pour fuir les attaques des Nzangere en traversant la rivière Ubangi au début du 19ème siècle pour s’installer en RDC.
Croyances Spirituelles et l’Art
Comme beaucoup de peuples africains, les Ngbaka ont une spiritualité ancrée dans le respect des ancêtres et la croyance en un monde invisible habité par des puissances occultes, bonnes ou mauvaises. Ils croient en un Être Suprême qu’ils appellent Gàlè, un nom partagé avec leurs frères Manza de RCA. Un autre nom, Gbogboso, « le grand esprit, maître du monde, » apparaît dans les contes, mais ne fait pas l’objet d’un culte direct. Le nom Nzâ ou MÙ nzâ est aussi parfois cité.
L’art Ngbaka est visible notamment à travers les masques dagara, portés lors des cérémonies d’initiation (gaza ou gazawili) marquant le passage des jeunes à l’âge adulte. Ces masques aux visages ovales et concaves, avec un nez triangulaire allongé et des rainures sur le front ou les tempes, sont souvent recouverts de kaolin.
Le Likembe (Sanza) et le kundu : deux instruments, Une ÂmeAu sein de cette culture vibrante, deux instruments se distinguent par leur importance : le likembe (ou sanza) et le kundu. Ensemble, ils forment un duo harmonieux qui enrichit la culture Ngbaka. Le likembe, fabriqué à partir de bois léger et souvent décoré de motifs géométriques et animaliers, est bien plus qu’un simple instrument ; il incarne un compagnon de vie et un porteur d’histoires.
Utilisations du Likembe et du Kundu :Musique et divertissement : Le likembe est utilisé pour accompagner les chants, les danses et les fêtes villageoises. Ses mélodies douces et mélancoliques créent une atmosphère intime et chaleureuse. Le kundu, instrument à percussion souvent fabriqué à partir de matériaux naturels comme le bois ou la peau d’animal, rythme les danses et les chants. Son son puissant et vibrant apporte une dynamique festive lors des célébrations.
Transmission des savoirs et des histoires : Les joueurs de likembe sont souvent des conteurs talentueux qui utilisent leur musique pour illustrer leurs récits et transmettre les valeurs de leur culture. En tant qu’instrument rythmique, le kundu accompagne les récits en ajoutant une dimension sonore qui renforce l’impact des histoires racontées.
Guérison et rituels : Le likembe est utilisé lors des cérémonies de guérison pour apaiser les malades et chasser les mauvais esprits. Le kundu peut également être utilisé dans des rituels de purification ou de protection, où son rythme intense est censé éloigner les énergies négatives.
Lien avec les ancêtres : Le likembe est considéré comme un instrument sacré qui permet de communiquer avec les ancêtres. Dans certaines cérémonies, le kundu est joué pour honorer les ancêtres et marquer leur présence dans les rituels.
Le Likembe et l’Initiation (Gaza/Gazawili) : Pendant les cérémonies d’initiation des jeunes à la vie adulte (gaza ou gazawili) ces instruments jouent un rôle crucial en accompagnant les chants et les danses des jeunes initiés. En somme, les Ngbaka sont les gardiens d’une culture riche et dynamique. Le likembe et le kundu ne sont pas seulement des instruments, mais des symboles vivants de leur héritage. À travers leur musique, ils racontent des histoires, guérissent les âmes et relient les générations, préservant leurs traditions tout en s’adaptant à un monde en évolution.